La guerre de la chocolatine a bien lieu !

La guerre de la chocolatine a bien lieu ! « Pain au chocolat ! » : " A chaque fois que cette dénomination se fait entendre, nous dit Philippe, de Bordeaux, en déplacement dans de nombreuses villes de France... mes cheveux se redressent. » Et pour cause ! Voilà une locution dévalorisante pour la viennoiserie et pour la vénérable chocolatine, une appellation plus... gouteuse. Explications.

AH ! CES PARISIENS

Le mot « chocolatine » s’entend le plus souvent, dans le Sud-Ouest de la France. Philippe, un jeune bordelais, bien trempé, du quartier « Chartronnais » lieu même, où, jadis, aux « Chartrons » étaient centralisés les chais de vins, avec un petit sourire narquois, s’esclaffe : « Au delà de nos frontières locales, l’on tronque le nom de cette bonne pâtisserie. Depuis que Bordeaux se voit colonisé par les populations de la capitale, fleurissent des « pains au chocolat » dans nos boulangeries rebaptisant notre chocolatine. C’est navrant ! »

PAS DE PAIN AU CHOCOLAT

« Pourquoi cette réaction ? » l’interpelle sa jeune voisine. Christelle est l’une de ces « nouvelles bordelaises », stupéfaite de vérifier qu’au pays de Montaigne les ambassadeurs du parisianisme sont souvent regardés avec une condescendance fanatique en demandant leur « pain au chocolat ». A Bordeaux, et dans le grand Sud-Ouest, il n’est pas de bon ton de bousculer les cultures, ni de cabosser les expressions locales surtout lorsqu'elles s'appliquent à la gastronomie. On n’aime pas çà !

PETIT PAIN ET SON CARRE DE CHOCOLAT

D’autant que l’argutie bordelaise, assortie d’une certaine susceptibilité sur la dénomination de la chocolatine, n’est surement pas inadéquate. Car, au delà de cette empoignade tenace, une évidence ignorée de la plupart des Français rétablit le sens impropre du nom donné à ce fameux « pain au chocolat ». En effet, la consommation de la chocolatine ne rencontre aucune similitude avec le simple petit pain accompagné d’un carré de chocolat offert aux écoliers en guise de collation ou de coupe-faim.

LA CHOCOLATINE N’EST PAS DU « PAIN » !

Aucune similitude entre le « pain au chocolat » et la délicieuse chocolatine roulée dans une pâte feuilletée dont la saveur n’est comparable à celle du « pain ». L’histoire nous renvoie, d’ailleurs, à son classement au rang de la viennoiserie, à côté du croissant. La noble chocolatine, à plus forte raison, l’artisanale, ne peut donc se satisfaire de la restriction « pain ». Elle se déguste, notamment, dans un salon de thé accompagnée d’un chocolat chaud, alors que le pain, aliment noble, se consomme au cours du repas.

METTRE LES FRANCAIS D’ACCORD

Pas plus que le « pain aux raisins », en réalité « raisintine », la chocolatine ne peut être associée à l’art de la boulangerie alors que sa fabrication relève de la discipline pâtissière viennoise. Alors, comment mettre fin à cette guéguerre, bien chauvine, manifeste et légitime chez les gens du Sud-Ouest ? La délicieuse chocolatée pourrait donc porter le nom de « croissant au chocolat » ce qui l’enroberait dans une appellation plus conforme et mettrait, enfin, tous ses dégustateurs d’accord.

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