Quel bilan pour les Européennes ?
Notre directeur, Joël-Pierre Chevreux, fait le point après les élections européennes.
Entretien : Aloïs Lang-Rousseau
Alois Lang Rousseau : Joël-Pierre Chevreux, quelles conclusions tirez-vous de cette élection européenne ?
J.P.C. : Je ne suis nullement surpris par les résultats. Souvenez-vous, j’avais annoncé l’avance du Rassemblement National bien avant les sondages de la semaine dernière, donnant gagnant le parti de Marine Le Pen.
Mais, la surprise, c’est la mobilisation massive des jeunes et l’émergence d’Europe écologie Les Verts. Cette poussée est une note très positive dans cette élection.
A.L.L. : LREM battu par le Rassemblement National, quelle analyse portez-vous ?
J.P.C. : Ce n’est pas une large victoire. Elle est proche d’un match nul. Un rapide constat nous montre que par rapport au premier tour des présidentielles, Emmanuel Macron perd deux points, le Rassemblement National en gagne deux, le Parti Socialiste également.
Quant aux Républicains, ils perdent douze points qui se retrouvent... chez les verts. En réalité, LaRem ne représente que 22% des votants. Il n’y a pas de quoi se gausser. C’est bien là la preuve que les Français ne se retrouvent pas massivement dans la macronie dite " progressiste " évoquée par ce parti.
A.L.R. : Rapide coup d’œil sur la situation, mais vous ne parlez pas du Parti animaliste ?
J.P.C. : Je partage, sans aucune réserve, le programme de cette association. La cause animale est à peine perceptible chez les politiques, pour ne pas dire inexistante, mais, je suis dépité par le particularisme de ses dirigeants. Je ne comprends pas leur comportement.
A.L.R. : Cette structure n’est pas une association, mais un parti à part entière...
J.P.C. : Un parti politique monothématique, n’a pas de précellence, donc aucun poids ! Je salue l’initiative, incontournable, de la défense des animaux, dans une société qui les ignore ou les maltraite ignominieusement. Je rends hommage, aussi, aux propositions très pertinentes, de ce groupement.
Elles méritent considération et mise en application rapide, notamment en ce qui concerne les animaux dits : « de boucherie » ou de « laboratoire ». Mais, l’isolement entretenu par les dirigeants de cette association, rend impossible une prise de conscience des problématiques qui entourent l’humain, les enfermant dans une réalité construite sur des idées reçues en politique. Or, il n’y a pas, d’un côté les uns et les autres. Tout est interdépendant, l’homme, l’animal et la nature.
A.L.R. : Leur faible score vous déçoit-il ?
J.P.C. : Oui, bien sûr, dans une certaine mesure, j’aurai préféré qu’ils atteignent au moins les 3% nécessaires pour être remboursés. Mais, il faut dire que cette organisation a subi, de plein fouet, le boycott des media et l’absence des bulletins de vote. Cela est purement scandaleux !
La cause animale mérite mieux ! Il existe bien une volonté délibérée, de la part de nos dirigeants soudoyés par les lobbys, les chasseurs, la communauté médicale, le secteur agro-alimentaire, de nuire à ce combat. Mais, il est évident, qu’au fil des ans, si l’on n’use pas de leviers psychologiques servant à favoriser une ouverture d’esprit plus large auprès de ses organisateurs, dans le but de réfuter cette notion d’isolement, leurs résultats continueront à ne pas atteindre les précieux enjeux convoités.
A.L.R. : Pourquoi, selon vous, ne s’intéressent t’ils pas à d’autres thématiques tout aussi préoccupantes que la cause animale ?
J.P.C. : J’avoue que je ne comprends pas cette attitude ! Ils avaient la possibilité de faire une alliance de circonstance avec le REV, le MHAN et le MEI pour peser sur le socle électoral. Ils se sont retirés, après maintes tentatives de négociations, et sans même donner suite aux deux demandes d’interview de INFOPREMIERE.
Alors que les media les ont ignorés. Cette attitude les isole, mais, fait plus grave, enferme encore plus le concept de la défense des animaux. Ça, je le déplore, et je le répète, je suis en totale harmonie avec leurs idées. Faire cavalier seul face à une action aussi importante est une démarche présomptueuse.
Hélas, elle dessert considérablement la cause défendue. Rester dans sa bulle, c’est être dans l’incapacité de participer aux interactions de la société. Ce comportement impacte négativement les moyens d’établir des connexions pour répondre aux besoins de transition d’une société où les humains, méritent, eux aussi, d’être pris en considération.
A.L.R. : Selon vous, Emmanuel Macron prend-il le vivant en considération ? Comment va-t-il réagir maintenant ?
J.P.C. : Emmanuel Macron est un excellent communicant. Il a été élu grâce à la magie des mots, sa jeunesse et son physique. Les Français ont cru sortir de la léthargie du gouvernement précédent. Ses propositions, reposaient, uniquement, sur une parfaite communication et la mise en place d’un pseudo programme basé sur une soumission aux milliardaires.
Nous constatons aujourd’hui les résultats d’une immense déception du peuple français. Il n’y a pas, chez lui et son gouvernement, de réelle volonté de changer sa ligne politique et de participer à un changement profond de l’Union Européenne, pas plus que de lui donner une véritable parole. L’application de cette politique explique l’émergence des partis populistes et d’extrême droite.
ALR : Donc, selon vous, rien ne changera ?
J.P.C. : Vous vous attendiez à quoi ?
A.L.R. : Un remaniement ministériel, une dissolution de l’Assemblée Nationale ...
J.P.C. : Une dissolution de l’Assemblée Nationale ne changerait rien ! Cependant, l’expérience du passé nous a montré qu’un président désavoué par la moitié de son peuple réagissait en conséquence. S’il persiste dans son autoritarisme, l’autre moitié ne tardera pas à le lâcher, à l’exception, bien sûr, des plus aisés, satisfaits des mouvements de sa politique.
Ses orientations, annoncées après le grand débat, vont se poursuivre. Il ne faut pas être grand prophète pour comprendre que cette fronde sociale à laquelle il est confronté, (antifiscale, anti sociale, depuis le 17 novembre dernier) continuera de s'exprimer. L’entêtement du président le mène tout droit à un rejet des Français. Il sera encore plus massif dans les mois à venir.
Il joue le non renouvellement de son mandat s’il sollicite de nouveau leurs suffrages. Pouvoir d’achat en baisse, hausses des carburants, insécurité, agriculteurs en détresse, services publics défaillants... Le non renoncement à un changement de cap, tant sur le territoire qu’au sein de l’Union Européenne nous mène droit dans le mur de la paupérisation et d’une démocratie bafouée.
A.L.R. : Le Premier ministre, Édouard Philippe, semble avoir entendu " Un message fort, reçu cinq sur cinq, reçu, aussi le message sur l'urgence écologique ", vous n’y croyez donc pas ?
J.P.C. : Edouard Philippe a appelé à une " nouvelle méthode " de gouvernement. Mais il a précisé qu’il n’y aurait pas de changement de donne ni envisagé son départ. Il veut mettre en œuvre une nouvelle méthode « pour davantage aider les territoires »... « pour mettre davantage d'humain dans sa politique »...
Cet enjeu de l'acte deux du quinquennat, ne répond pas exactement aux attentes des Français et des gilets jaunes. C’est le cas aussi pour les autres Etats européens insatisfaits des agissements rigides de leurs dirigeants. Ces électeurs se sont massivement rendus aux urnes. Notons une participation atteignant 51% dans 27 pays de l'Union selon les chiffres communiqués par le Parlement.
A.L.R. : Quelle est votre vision de l’Union Européenne ? Etes-vous favorable au Frexit ?
J.P.C. : Non ! Je suis convaincu qu’un Frexit isolerait la France du reste du monde à l’instar du parti animaliste qui veut faire cavalier seul dans le monde politique et n’obtient que des résultats en conséquences.
Comment pourra-t-on faire face à la Chine et aux Etats-Unis, notamment sur le dossier des GAFA et de leurs homologues chinois sachant que leurs possibles concurrents en Europe sont suédois, allemands, et non français ?
Je suis favorable au changement profond de l’Union européenne. Je l’ai déjà dit, dans ces colonnes, la place de l’homme, de l’animal et de la nature est supérieure aux enjeux économiques, aux marchés financiers et aux lobbys. C’est cette forme d’union que je convoite.